Ceremony #3 - 2013 © Bruno Aveillan |
Grâce à Isolation Ceremony, Bruno
Aveillan révèle quelques fragments de l’éternelle et néanmoins mystérieuse
histoire humaine où l’amour le dispute à la mort, l’Enfer au Paradis.
L’artiste n’a pas
son pareil pour composer des atmosphères minimalistes qui content l’essentiel
sur toutes les gammes de lumière et de pigments. Il joue sur des paradoxes
narratifs impressionnistes, mêlés au cœur d’étranges cérémonies et de
troublants rituels, pourvus d’époustouflantes vanités contemporaines.
Dans Isolation Ceremony se trame un drame
équivalent à celui qui frappe la jeune Maroussia, de Marina Tsvetaeva, qui se
damne pour l’amour de son vampire et à celui d’Eurydice qui fait le choix de
rester au royaume d’Hadès plutôt que de suivre Orphée venu la sauver.
Un voile de mariée
figé dans les airs tel un fantôme, image fatale d’une promise qui n’est plus, un
animal écorché, écartelé au-dessus d’une baignoire, dans la lignée des
Rembrandt, Soutine, Chagall, Bacon, Saville et leurs chefs-d’œuvre évoquant la
crucifixion et le sacrifice.
Ici, le douloureux
destin de femmes s’y devine, femmes aux prises avec l’amour absolu qui les isole
et les condamne pour mieux les sanctifier. Cérémonie suprême mise en scène avec
maestria par Bruno Aveillan.
Eurydice, au chignon
rouge, qui a refusé le retour à la vie sur terre avec Orphée, retire son
manteau immaculé de fiancée pour mieux s’installer à jamais en Enfer où il fait
déjà bien chaud. Maroussia erre dans
les ténèbres hantées par des apparitions spectrales, tremble de percevoir la
présence de son Gars, buveur de sang.
Chacune traîne sa
détresse à sa façon. L’une et l’autre s’aventurent au cœur de funestes décors,
entre les décombres et les ruines, parmi d’effrayantes chimères, plongées au
fond de leur propre désolation, cruelle et magnifique, dont aucun temps ni
aucun être ne saurait jamais plus les libérer.
Observer chaque
scène avec la plus fine attention, tous les sens en éveil pénétrer l’atmosphère,
et soudain voir le diable bel et bien caché dans les détails… si ce n’est Dieu.
Texte accompagnant l'exposition Isolation ceremony de Bruno Aveillan